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Comment peut-on être anarchiste, sur Divergences

lundi 7 septembre 2015 :: Permalien

— REVUE de PRESSE —

Comment peut-on être anarchiste sur Divergences,12 juillet 2015.

« Comment se manifester en tant qu’intellectuel anarchiste, dans une époque où les démocraties se vantent d’avoir écarté le spectre révolutionnaire, tout en usant du vieil épouvantail “terroriste” pour justifier un arsenal répressif sans précédent, quitte à faire de l’“indigné” une figure à la mode… ?
En militant, en écrivant »…

Ainsi commence Comment peut-on être anarchiste ?…
Par une introduction dans laquelle Claude Guillon replace son nouvel ouvrage dans le contexte d’une série d’articles, de tracts, et autres de ses écrits publiés durant les quinze dernières années. Ceux-ci étant regroupés par thèmes qui lui sont chers, des thèmes et des paroles souvent polémiques, voire tabous, si l’on s’en tient aux règles instituées, dont il n’est pas simple de se défaire. L’intérêt est sans doute, et avant tout, de porter les divergences à la surface, histoire de bousculer la pensée courante et d’en discuter de manière libre et critique.
Dès l’introduction, quelques remarques viennent à l’esprit, notamment sur l’emploi du terme « démocraties » qui, j’imagine, sont les pouvoirs politiques, médiatiques, universitaires ayant pignon sur rue ? Par ailleurs, la mode à la sauce « indigné » a bien sûr été adoptée et encouragée pour la bonne conscience suscitée et, en général, l’absence d’engagement actif. Cependant, si cette « indignation » a participé d’une prise de conscience pour certains et certaines… Pourquoi pas ? Ce n’est pas le cas de la grand-messe du 11 janvier dernier, totalement instrumentalisée, autour du slogan « Je suis Charlie » et sur laquelle Guillon revient à la fin de son ouvrage. Enfin, autre remarque, le terme anarchiste recouvre une myriade de tendances, de courants, d’actions, d’attitudes, donc ne fallait-il pas dès l’introduction proposer une base d’analyse synthétique, actuelle et personnelle du terme ?
On le voit, Comment peut-on être anarchiste ? de Claude Guillon soulève d’emblée des questionnements. Par exemple, dans sa critique de la publication des textes de Noam Chomsky, et le culte qu’il a généré chez quelques-un-es, il n’apparaît pas — au-delà de certains reproches qui ne sont pas souvent imputables à son auteur —, de propositions ou de préconisations de méthodes révolutionnaires pour changer la société. Finalement, on pourrait considérer que la critique des textes de Chomsky s’adresse plus à l’utilisation de son travail et à la médiatisation qui en est faite, qu’à l’analyse radicale de la politique étrangère états-unienne à partir des faits et de ses répercussions. Concernant l’État comme « dernier rempart contre la dictature privée », on peut aussi se demander si le cas des États-Unis est comparable à celui de l’Europe ?
Quant au « corps critique » dont Claude Guillon tente d’examiner sans faux-semblants nombre de ses aspects, qu’il s’agisse entre autres de « l’hypermarché du porno publicitaire », du viol, du consentement (?), de la soi-disant légitimité des besoins masculins qui justifierait la prostitution et les violences, de la question du genre, les réflexions ne peuvent que provoquer des réactions. Des réactions d’autant plus vives que la sexualité, l’intimité, le privé étant politiques et sensibles, il faut alors les articuler avec les principes anarchistes basés sur la liberté, l’égalité et le respect de l’autre. De plus, ce corps « usé par le travail, génétiquement modifié par les polluants industriels, formaté par la publicité, la mode et la pornographie, le corps humain a-t-il un avenir ? On en douterait, à considérer ceux — artistes d’avant-garde, scientifiques et militaires — qui le déclarent “obsolète” et travaillent à son “dépassement” technologique. »
Comment peut-on être anarchiste ? Pourquoi est-on anarchiste ? 
Qui est anarchiste ? Sur quoi se baser pour devenir anarchiste : 
sur le refus de l’autorité ? 
Sur le rejet de la domination ?
À réfléchir et à discuter…

Christiane Passevant