Le blog des éditions Libertalia

Les Rois du rock, dans Le Magazine littéraire

lundi 27 avril 2015 :: Permalien

— REVUE de PRESSE —

Paru dans Le Magazine littéraire, août 2013.

Salut à toi !

De la gouaille et de l’argot pour ce portrait de la jeunesse punk des années 1980 par Thierry Pelletier dans Les Rois du rock.

« La moitié de la gueule rasée, une double crête sur l’autre, le nez et l’oreille reliés par une chaîne, il avait une sacrée touche, l’ami Génocide. Pupille de la nation, il se définissait comme “trilogique”. Et nazi aussi, un peu, mais ça, on lui avait expliqué que ce n’était pas bien. » Les Rois du rock de Thierry Pelletier réveillent l’argot du bitume parisien et dressent une galerie de portraits de jeunes gens qui traînaient leurs Doc entre rades de la place de Clichy et squats de la rue du Chevaleret, dans les années 1980. Les petits-bourgeois les regardaient avec dédain : ces jeunes, c’était pas l’élite. Minots, ils savaient être parmi les tout derniers. Cette jeunesse, qui a croisé l’essor du rock alternatif, courait de concert en concert, chopant plus facilement des mandales que des princesses, pressée de tout vivre tout de suite. Les Bérurier noir, alors groupe punk confidentiel, les attiraient à l’Usine de Montreuil. Le ventre plein de salades en boîte et de whisky bon marché chouravé, ils occupaient leurs soirées à se vanner après avoir fait un tour au centre commercial et au local à poubelles pour se défoncer. Avec les filles, c’était l’amour sans étoile. Une longue scène de baise sous acide dans un hôtel miteux révèle un abîme d’incompréhension quand le « zboub » ne répond plus. Même chez les libertaires, les hommes et les femmes ne jaspinent pas le même langage. Les Ludo et les Titi portent la mèche crantée et le perfecto ; ils ont la tchatche et des rêves plein la tête, une générosité enfantine et une confiance en l’avenir. Ils dérivent pourtant. La jeunesse fofolle et insouciante a vite fait de rentrer dans les rangs des dingues et des paumés.
Thierry Pelletier poursuit ses portraits calcinés débutés avec La Petite Maison dans la zermi, publié en 2007, pendant littéraire des Naufragés de Patrick Declerck. Il impose son art de la concision pour montrer l’aptitude humaine à la déchéance. Un pas dans la précarité, et tout est foutu. Quand il recroise ses anciens potes, il comprend que la question n’est pas de savoir comment ça va, mais plutôt pour combien de temps. La vie n’a pas fait de cadeau à ces drôles d’enfants.

Enrica Sartori