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Fascisme et grand capital, dans Le Combat syndicaliste

jeudi 12 novembre 2015 :: Permalien

— REVUE de PRESSE —

Dans Le Combat syndicaliste, n° 405, octobre 2015.

Capital brun

C’est la sixième publication depuis 1936, par cinq éditeurs différents. Comme quoi Fascisme et grand capital, de Daniel Guérin serait comme un « classique ». Et évidemment, on ne peut s’empêcher de le lire ou le relire tant comme élément d’histoire et d’analyse, que comme contribution à la compréhension du présent. Les fascismes italien et allemand ont mobilisé la paysannerie déclassée, les petits boutiquiers puis détourné le lumpen-prolétariat, petites frappes, enragés, laissés pour compte, de toute aspiration révolutionnaire autre que le fascisme. Si on veut considérer le fascisme comme une révolution. Quand il écrit ce livre, nourri de témoignages de militants antifascistes, Guérin assiste à la montée inéluctable des deux fascismes européens, version mussolinienne et hitlérienne. Il remarque que les prétendus « socialistes », assortis de l’adjectif national, ont mis au pas quelques bourgeois récalcitrants, mais sans jamais s’attaquer bille en tête à la propriété capitaliste, malgré des discours en apparence opposés au capital. Niant la lutte de classe, ils ont amalgamé la bourgeoisie et la petite-bourgeoisie déclassées à des éléments du peuple. En magnifiant la force brutale, revanche de ces amertumes sociales collectives, ils ont pu constituer des groupes armés et lancer ses nervis contre les organisations ouvrières, coincées dans leurs logiques légalistes. Ces bandes en chemises noires ou brunes n’auraient pas prospéré sans le financement offert par les grands capitalistes italiens et allemands. L’antisémitisme joue aussi le rôle de ciment des déshérités (et on peut penser aux opérations de séduction trouble d’un Soral aujourd’hui qui dans le même registre mixe un anticapitalisme primaire avec un antisémitisme viscéral). Guérin explique comment les nazis parvinrent à « transmuer l’anticapitalisme de leurs troupes en antisémitisme ».
« L’antifascisme est illusoire et fragile, qui se borne à la défensive et ne vise pas à abattre le capitalisme lui-même », écrit Guérin en dénonçant l’antifascisme de façade, et la vacuité du slogan « Plus jamais ça » qui oublierait l’essentiel, l’oppression capitaliste.

Nicolas, Interpro Nantes