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lundi 22 décembre 2025 :: Permalien
Publié sur À contretemps, le 22 décembre 2025.
En ces temps d’incertitude où tout laisse à penser que, partout, le monde, aspiré par les logiques guerrières, bascule vers le pire, la parution de ce livre majeur sur Victor Serge – dont l’éditeur annonce la parution du second tome pour bientôt – est une excellente nouvelle. D’abord parce que Claudio Albertani, son auteur, qui fut un ami proche de Vlady [1], peintre de talent et fils de Serge, est probablement aujourd’hui l’un des meilleurs connaisseurs de l’inoubliable auteur, entre autres titres, des Années sans pardon et des Mémoires d’un révolutionnaire. Ensuite parce que ce livre fait écho avec l’Histoire, celle que Serge a vue s’abattre, d’une guerre mondiale à l’autre, en passant par plusieurs révolutions, dans les hoquets d’un temps où il n’était déjà pas bon d’être dissident.
Aux origines
Complexe fut le rapport de Serge à l’anarchie, complexe et mal compris par les anarchistes – qui, il faut bien le reconnaître, ne font pas toujours assez d’efforts pour saisir la complexité des êtres et des situations. On me dira qu’il n’y pas qu’eux et c’est une évidence, mais c’est beaucoup d’eux qu’il s’agit dans ce livre, et plus précisément des anarchistes de la marge et des limites, pour qui Serge oscilla entre une sympathie affichée et une conscience aiguisée de leurs manques.
Mais peut-être faut-il d’abord dresser – histoire de le situer à partir des nombreux et minutieux repères que nous offre Claudio Albertani – un bref portrait du personnage : de son vrai nom Victor Napoléon Lvovtich Kibaltchitch, Victor Serge naît à Ixelles (Bruxelles) en 1890 dans une famille d’exilés anti-tsaristes qui manifeste beaucoup de sympathies pour l’insoumission et l’activisme des populistes russes (narodniki). Il est longtemps apatride avant de devenir franco-russe. La vie de sa famille est dignement misérable. Comme celle des pauvres, en général. Le clan erre beaucoup entre Belgique et Angleterre. Par manque d’argent, le gamin fréquente peu l’école, mais sa « passion de savoir » – que rien n’assoupit jamais – est systématiquement encouragée par son père, qui lui sert de découvreur. C’est ainsi qu’il se fait, lecture après lecture, et qu’il devient ce qu’il sera, l’un des plus brillants auteurs du XXe siècle.
« Dès treize ans, confia Serge à ses Carnets [2], je vécus seul, dans des chambres meublées, par suite des voyages et des mésententes de mes parents. » Il travaille où il peut, gagne des broutilles, mais noue des amitiés solides, notamment avec Raymond Callemin (1890-1913) – le futur « Raymond la Science » de la bande à Bonnot –, avec Jean de Boë (1889-1974), illégaliste avant de devenir anarcho-syndicaliste, et Lucien Courbe (1888-1916). Une bande des quatre qui, les dimanches, échafaudent des idées en errant ensemble dans Bruxelles, jouent aux sarcastiques et commentent les lectures qu’ils ont faites. Ils sont, dira Serge, « plus unis que des frères ». Le reste coule de source : la politisation, du côté des socialistes d’abord, mais les plus « radicaux » ; l’agitation antimilitariste ; les échos de la première révolution russe de 1905, qui chavirent Serge ; le dégoût des sphères dirigeantes socialistes ; la lecture assidue de La Guerre sociale de Gustave Hervé ; puis, sous l’influence de Jean de Boë, la conversion à l’anarchisme. Jean a dix-huit ans, Raymond et Victor seize, Lucien quinze. Ils « ont trouvé, note Claudio Albertani, ce qu’ils cherchaient : non seulement une doctrine, mais un mode de vie, une règle d’action, une force collective qui renverse la passivité, l’hypocrisie, les chaînes du pouvoir ». Et, plus encore, une raison d’être au monde pour le changer. C’est dans cet élan d’enthousiasme que la bande découvre l’existence de « L’Expérience », une communauté anarchiste située dans la forêt de Soignes, à Stockel, un faubourg de Bruxelles [3]. La vie y est bucolique et l’ambiance phalanstérienne. Une douzaine de personnes vivent et produisent de quoi se nourrir et éditent deux journaux – L’Émancipateur, organe du Groupement communiste libertaire (CGL) et Le Communiste, organe de la communauté – qui fait lien avec d’autres « milieux libres » ayant essaimés ici ou là. C’est dans les colonnes du Communiste – n° 8, daté du 18 janvier 1908 – que la bande des quatre publie sa « profession de foi », probablement rédigée par Serge [4]. Elle est signée « Groupe révolutionnaire de Bruxelles » (GRB). On y lit : « Nous voulons la transformation complète de la société : nous voulons abolir le capitalisme, la classe patronale, le travail salarié, l’État et toutes ses institutions. » Tout un programme ! Serge affinera son style dans Le Révolté, de Bruxelles, en 1908 et 1909. L’atteste une chronique qu’il y écrira, sous le nom du Rétif, publiée dans son n° 23 (« Les sans-travail »). Elle relève de la critique de l’économie politique, dénonce les systèmes déshumanisants de production automatisée et se conclut ainsi : « Pris dans une course folle à l’argent, otages d’une véritable frénésie de production, les rois du capital ne voient pas l’abîme épouvantable vers lequel ils se dirigent. » Notons, au passage, que ce jugement n’a pas pris une ride.
De quoi l’anarchie peut-elle être le nom ?
À vrai dire, l’anarchie de ce temps, les premières années du XXe siècle, est furieusement plurielle. Furieusement parce qu’elle peut emprunter, dans la fureur, des chemins de traverse, des sentes pentues, des voies de garage ou des culs de sac. La question qui fait principalement débat, dans ses marges illégalistes, c’est celle des moyens que la noble cause de l’émancipation humaine pourrait justifier. Pour le jeune Serge chroniqueur au Révolté, la position est nette. En réponse à Rhillon, un camarade qui, « coûte que coûte », soutient que « tous les moyens sont bons et que la tâche des anarchistes est de susciter la haine et l’esprit de vengeance dans le peuple », Serge répond que « les moyens doivent correspondre aux fins », tout en précisant que, « si l’expropriation individuelle n’est pas un moyen de transformer la société, les rebelles peuvent se trouver contraints de la pratiquer » [5]. Ce balancement est sa marque. Au fond, Serge n’a aucun goût pour la violence politique, pour l’exaltation de la force, mais il ne condamne jamais, au nom d’une juste ligne ou d’une morale supérieure, les compagnons qui y cèdent, souvent par désespoir. Nombreux sont, sur ce point, les exemples de son invariante conduite que nous donne Claudio Albertani. L’affaire Bonnot et ses suites, comme nous le verrons, en attesteront.
À presque dix-neuf ans, et sans qu’on en connaisse exactement le motif, Serge décide de quitter Bruxelles pour Lille. Il y souffre un temps la faim et la dépression qui naît de la misère. Quand les choses s’arrangent un peu, il y trouve un travail d’assistant photographe dans la commune d’Armentières. Tiré d’affaire, il reprend ses chroniques au Révolté et étudie l’histoire de la littérature. C’est à Lille qu’il rencontre Rirette Maîtrejean [6]. Couturière de profession, elle est une active militante du réseau des Universités populaires (UP), ces institutions communautaires et autonomes créées par le mouvement ouvrier dans le but de former des travailleurs émancipés, c’est-à-dire libres et éduqués. Rirette et Victor se retrouveront à Paris. Victor galère de piaule en piaule, s’embauche où il peut et pour peu, vit de leçons particulières et de traductions, noue des contacts avec des compagnons de la mouvance anarchiste individualiste où son pseudo fait carte d’entrée, participe aux grandes manifs de protestation contre l’ignoble exécution, à Barcelone, du pédagogue libertaire Francisco Ferrer (1859-1909), donne des causeries au siège de l’anarchie (sans majuscule).
On pourrait se demander pourquoi Serge, dont l’affinité première fut communiste libertaire, finit par verser dans cette mouvance de l’anarchisme qui, d’une certaine manière, fut son opposée. Sur ce point, il n’a jamais été très éloquent. Ce qu’on croit deviner, c’est qu’il a trouvé, dans cette famille d’en-dehors, quelques êtres d’exception qui voulaient vivre leurs convictions dans l’ici et maintenant et sans attendre un hypothétique soulèvement des foules dont, par ailleurs, ils méprisaient le caractère velléitaire et panurgique. C’est au même moment que Rirette et Victor comprennent, « un jour d’automne où ils lisaient ensemble François Villon » (Albertani), qu’ils s’aiment et se complètent. A-t-il été authentiquement individualiste, ce parfois déroutant Serge ? On peut le croire, mais à sa manière là encore. Dans les premiers articles qu’il donne à Albert Libertad (1875-1908) pour sa revue l’anarchie [7], en même temps qu’il critique la conception blanquiste de la révolution, qu’il juge à raison dictatoriale, il va jusqu’à nier toute possibilité d’émancipation par l’action collective tant les masses seraient abruties ou promptes à céder à de nouvelles formes d’esclavage. S’il a adopté presque tous les tics de la phraséologie anarchiste individualiste, y compris dans ce qu’ils ont de plus désespérant, il cherche à se situer au-dessus des querelles des petites chapelles qui peuplent cet hétéroclite milieu. C’est dans cette perspective éclectique qu’il fonde, autour de quelques amis, le groupe La Libre Recherche, où, dans les arrière-salles du Café Dubourg, puis de La Lutèce sociale, se tiennent, sur des sujets divers et variés, des causeries ou des conférences. Il en donne aussi à l’Université populaire du faubourg Saint-Antoine et à la Maison commune du 43 rue de Bretagne, dans le Marais. Infatigable, il y atteste d’un antimilitarisme affirmé, et sentant la guerre qui vient, d’un pacifisme révolutionnaire sans faille. Toutes choses qui, on s’en douterait, incitent la police française à le ficher auprès de la 3e brigade, composée de 24 agents spécialisés dans « l’anarchisme » et convaincus qu’avec ce rétif Victor Napoléon Kibaltchitch ils tiennent un bon client.
C’est à cette même époque que Rirette et lui font la connaissance du jeune serrurier René Valet (1890-1912), qu’ils surnomment « Poil de carotte » et qui semble porter en permanence sur le visage un « masque de souffrance ». Ce gamin qu’ils aimèrent tant va devenir l’un des personnages centraux de ce que la presse à grand tirage va bientôt appeler la « bande à Bonnot » et dont les activités vont faire grand bruit dans le Paris de la très mal nommée « Belle Époque ».
Quand la roue s’emballe…
En janvier 1910, l’affaire Liabeuf [8] fait la une des journaux, qui se déchaînent contre les anarchistes. Le 13 juin, lors d’une grève des charpentiers parisiens, l’ébéniste anarcho-syndicaliste Henri Cler – surnommé « Biffin » – meurt sous les coups de la police. Plusieurs dizaines de milliers personnes assistent, à Pantin, à ses funérailles, le 26 juin. La répression policière est terrible.
En relation directe avec cette vague répressive, la tension monte au sein de la mouvance individualiste. Ça craque à l’anarchie entre Libertad et Georges Mathias Paraf-Javal (1858-1941), dit Péji. Serge ne prend pas parti dans la querelle, même s’il est franchement hostile à la dérive scientiste du second et de son Groupe d’études scientifiques (GES) qui tente, le 8 mai de cette même année 1910, de prendre d’assaut l’historique siège montmartrois de l’anarchie situé rue du Chevalier-de-la Barre. Le coup de force se solde par un mort – Louis Sagnol, membre du GES. Il fait plusieurs blessés et provoque l’arrestation de tous les impliqués dans la rixe. Fin juin, le siège de l’anarchie, sous la direction d’André Lorulot (1885-1963), s’installe à Romainville, en proche banlieue parisienne, dans une vieille bâtisse à deux étages. Elle abrite une imprimerie et des chambres d’amis. L’endroit est bucolique. Arboré, le jardin donne des fleurs, des fruits et des légumes. Presque une incitation, si cela était possible sans se trahir, à se retirer du monde.
Début 1911 et autour de la revue l’anarchie, la maison de Romainville devient vite une base où se côtoient des en-dehors au passé notoire et des jeunes compagnons gagnés à la cause de l’anarchisme individualiste. Parmi eux quelques anciens Bruxellois, comme Callemin, De Boë et Carouy, auxquels se joignent de nouveaux impétrants comme André Soudy (1892-1913), surnommé « Pas-de-Chance », et Octave Garnier (1889-1912), qu’on appelle « Le Terrassier » et que Serge décrit comme une « force errante ». La pente naturelle de cette jeunesse révoltée c’est, à n’en pas douter, l’illégalisme. Sur ce terrain, Serge ne les suit pas, ce qui en surprend plus d’un car ses articles sont parfois ambigus sur le sujet. Les discussions deviennent parfois houleuses entre les convives de cette libre communauté de réfractaires qui héberge, on le saura plus tard, la plupart des futurs « bandits tragiques » de la « bande à Bonnot » [9].
Dans la tourmente
Quand l’anarchie connaît une nouvelle crise interne et que Lorulot en quitte la direction pour fonder L’Idée libre, une publication plus en accord avec son individualisme foncièrement philosophique, Serge et Rirette se voient sollicités pour maintenir en le reprenant le titre de Libertad [10]. Un soir de ce mois d’été où il donne une conférence sur l’illégalisme, Serge ne mâche pas ses mots : si la violence est inévitable, laisse-t-il entendre à ses auditeurs, « certaines méthodes » conduisent au suicide collectif. Dans la salle, Garnier le traite de « vendu », Callemin de « bourgeois timoré » et Carouy tend vers lui un poing menaçant. Les ponts sont déjà coupés, même s’il peine à l’admettre. Il lui faudra pourtant bientôt le constater en faisant en sorte de comprendre cette dérive sans l’excuser et de se distancer des meurtres qu’elle a occasionnés sans trahir les amitiés passées. Exercice difficile dont Serge s’acquittera avec noblesse et honneur en le payant de cinq années de prison alors qu’il n’était pour rien dans cette suicidaire aventure.
On peut avancer que, si Serge désapprouve pour le moins « les actions de ses amis-adversaires », comme le note Claudio Albertani, la monstrueuse campagne de presse qui couvre leurs actes le révulse à un point tel qu’il répond dans l’anarchie : « Je suis de l’autre bord, et je ne crains pas de l’avouer, je suis avec les bandits. Je trouve que leur rôle est le beau rôle ; parfois, je vois en eux des hommes. Ailleurs, je ne vois que des mufles et des pantins. […] Les bandits prouvent leur ferme volonté de vivre [11] » On peut douter, bien sûr, de cette volonté de vivre, mais pas du courage de Serge, qui ce faisant, accepte les conséquences de ses choix éditoriaux. Bientôt, il sera convoqué par Louis-François Jouin (1871-1912), sous-chef de la Sûreté, et soumis à un chantage. Rapporté par Rirette Maîtrejean [12], cela donne ceci :
— Vous connaissez ces milieux, déclare Jouin – qui se pique d’admirer Sébastien Faure (1858-1942). Restez ici une heure, nous parlerons d’eux, personne n’en saura rien. Si vous ne le faites pas, nous vous emprisonnerons pour complicité.
— Faites-moi arrêter si vous croyez en avoir le droit, répond Serge, en haussant les épaules avec son fatalisme habituel.
Le jeudi suivant, Le Rétif signe un article – « Anarchistes et malfaiteurs » – dans le n° 356 de l’anarchie. Précisant d’entrée qu’« il ne suffit pas d’être bandits pour être anarchistes », il réitère sa position : « Ces malfaiteurs m’intéressent, et j’ai pour eux autant de sympathie que de mépris pour les honnêtes gens, qu’ils soient ratés ou arrivés. » C’est ce qu’on appelle avoir de la classe ! Inculpé pour « vol et recel » après que la police eut retrouvé, au siège de l’anarchie, trois revolvers provenant du cambriolage de la rue Lafayette, on ajoutera la qualification d’« association de malfaiteurs » pour boucler la boucle. Le 1er février 1912, Victor Serge franchit les portes de la Santé. Le 25 mars, ce sera au tour de Rirette Maîtrejean, accusée de recel, de se retrouver à la prison Saint-Lazare. Elle a confié la responsabilité éditoriale de l’anarchie à E. Armand (1872-1962), grande figure de l’anarchisme individualiste, qui s’engage à l’assumer malgré les risques qu’il encourt en cette sale période de déchaînement anti-anarchiste, « tant que les circonstances actuelles ne seront pas modifiées » [13], soit jusqu’à la mise en liberté de Rirette.
La roue broyeuse de l’Histoire
On a beau la prendre dans tous les sens, exercice auquel s’adonne méticuleusement l’auteur de ce livre, la saga de Bonnot et de sa « bande », tragique de bout en bout, fut une authentique marche funèbre. Au bout du compte, en dehors des nombreuses victimes qu’elle occasionna, elle se solda par la mort de son héros perdu, qui probablement la cherchait, dans un duel très inégal. Le 24 avril 1912, le « farouche apache » – comme le désigna la presse – se réfugie au 63, rue de Paris, à Ivry-sur-Seine, dans l’arrière-boutique de l’atelier de soudure du compagnon Antoine Gauzy (1879-1963). Par un hasard des circonstances – recoupement ou dénonciation ? –, Jouin, le sous-chef de la Sûreté, a eu vent de cette piste. Lorsqu’il fait irruption dans le local, Bonnot l’abat d’un tir précis et blesse grièvement l’inspecteur principal Louis Alphonse Colmar, qui l’accompagne. Échappant une dernière fois au sort que lui ont réservé les autorités, Bonnot file à Choisy-le-Roi, où il trouve refuge dans l’atelier de mécanique de Jean Dubois (1870-1912), un anarchiste illégaliste d’origine russe. La planque n’est pas bonne. Elle se situe sur un terrain à découvert. Le siège policier sera facile à tenir. Deux jours. Dehors, une foule de 10 000 badauds dopés à la haine appellent à la mort de Bonnot. Dubois tombera le premier. Bonnot, qui a sept balles dans le corps, tiendra un peu plus longtemps enveloppé dans un matelas, avant de succomber à ses blessures. Juste après avoir écrit en lettres de sang sur un mur de son dernier refuge que Dieudonné, Madame Thollon, Gauzy et Petitdemange étaient innocents. « Glorieuse victoire de dix-mille contre un, écrira l’écrivain désespérément mystique Léon Bloy (1846-1917). Le pays est dans l’allégresse et plusieurs salauds seront décorés. Heureusement Dieu ne juge pas comme les hommes. [14] » L’affaire Bonnot sera définitivement close, dans la nuit du 15 au 16 mai, avec la découverte de la planque de Garnier et Valet, à Nogent-sur-Marne. Là encore, il y aura siège et résistance mémorable des assaillis. Deux jours durant. Il faudra employer l’artillerie lourde et les Zouaves pour en finir avec eux. Ils ne tombent pas vaincus, mais écrasés, comme on le lira dans l’article que l’anarchie consacre à cette exécution [15].
Le procès des « bandits anarchistes » se déroule du 3 au 27 février 1913 au Palais de justice. Les accusés sont au nombre de 20 – 17 hommes et 3 femmes : Rirette Maîtrejean, Victor Serge, Raymond Callemin, André Soudy, Élie Monier, Eugène Dieudonné, Édouard Carouy, Marius Metge, Marie Vuillemin, Barbe Leclerc, Jean de Boë, David Bélonie, Léon Rodriguez, Jean Dettweiller, Henry Crozat de Fleury, Antoine Gauzy, Pierre Jourdain, Charles Reinert, Bernard et Jean Poyer. Le 26 février tombent les sentences : Callemin, Soudy, Monier et Dieudonné [16] se voient condamnés à mort ; Carouy [17] et Metge aux travaux forcés à perpétuité ; Jean de Boë à dix ans de bagne à l’île du Diable ; Victor Serge à cinq ans de prison et cinq ans d’interdiction de séjour sur le territoire français. Les trois femmes – Rirette, Barbe et Marie – sont acquittées, ainsi que Léon Rodriguez. Le 21 avril, Callemin, Soudy et Monier seront guillotinés secrètement à la prison de la Santé. On dit que Callemin – alias Raymond-la-Science – s’adressa aux quelques journalistes et représentants de l’Ordre bourgeois venus assister à cette mise à mort en leur lançant cette phrase de défi suprême : « C’est beau, hein, l’agonie d’un homme ! »
Après quatorze mois de préventive, Serge devient le condamné 6731 de la maison centrale de Melun. De cette expérience, il tirera un admirable livre – Les Hommes dans la prison [18] – où, sous la forme d’un roman, il s’attachera, comme il le formula lui-même, à « dégager, par la création littéraire, le contenu humain et général d’une expérience vécue ». Pour lui, le seul triomphe qui compte, c’est de ne pas succomber à la barbarie pénitentiaire. Et la seule façon d’y parvenir, comme le note Claudio Albertani, c’est de fonder un « nous » pour « entretenir la flamme de la vie et de l’entraide ». S’il est toujours adepte de l’anarchisme individualiste, on a des raisons de croire que quelque chose bouge dans sa tête. Comme une reconsidération des priorités existentielles qu’implique l’importance qu’on accorde à l’« individu » et au « collectif ». Serge ne le dit pas comme ça, mais c’est comme ça qu’on peut l’entendre. Dans une démarche de mutation.
Affecté à l’imprimerie de la Centrale de Melun comme typographe, imprimeur ou correcteur, selon les nécessités, Serge sait bien que le travail en prison est le degré le plus intense de l’exploitation, mais tout vaut mieux, pense-t-il, que de rester toute la journée en cellule à tourner en rond. Et puis l’écrit, Serge, ça le connaît, même si ce qu’on imprime ici – quelques ouvrages scientifiques, mais surtout de la paperasserie administrative et des bulletins d’enquête judiciaire – ne fait pas rêver. Parmi ses compagnons de labeur, il y a de tout, écrit-il : « des hommes moyens et des hommes remarquables portant en eux une étincelle divine comme partout ailleurs » [19].
L’Histoire s’accélère. Le 31 juillet 1914, Jean Jaurès est assassiné ; le 1er août, la mobilisation générale est décrétée pour le 2 ; le 3, l’Allemagne envahit la Belgique ; dans les jours qui suivent, à l’exception de quelques dissidents libertaires et syndicalistes révolutionnaires, le mouvement ouvrier organisé se rallie à l’Union sacrée. Gustave Hervé troque l’enseigne de La Guerre sociale contre celle de la La Victoire. Une hécatombe des consciences soudain saisies par la fièvre patriotique la plus obscène.
Quelques années passent encore. Longues comme un jour sans pain. Le détenu 6731 de Melun n’est plus loin recouvrer la liberté d’un monde sens dessus dessous. Le 16 mai 1916, les autorités lui confirment qu’il fait l’objet d’un arrêté d’expulsion du territoire à dater de l’expiration de sa peine, prévu pour le 31 janvier 1917. Il aura passé 1 823 nuits à rêver de ce jour. « La meule, écrit Claudio Albertani, cette machine qui dévore à petit feu, ne l’avait pas écrasé. Il en était sorti entier et avec sa raison intacte, peut-être plus fort pour le simple fait d’avoir survécu. »
De Paris à Barcelone
Le retour à la « liberté » parisienne – douze jours avant de quitter le territoire – ne donne pas beaucoup de raisons d’espérer à Serge. Les liens avec Rirette se sont distendus et la guerre provoque des effets relativement inattendus dans les rangs anarchistes. C’est ainsi qu’il prend connaissance du Manifeste des 16, où quelques figures notables de l’anarchie, telles Pierre Kropotkine (1842-1921), Jean Grave (1854-1939) et Charles Malato (1857-1938), prennent le parti « défensiste » consternant de choisir le camp de la guerre au nom de la résistance au militarisme allemand. Le 12 février 1917, lui prend le train pour Barcelone, centre névralgique d’un anarchisme social aussi intensément pratique que minimalement conceptuel. « C’est dans les rues sinueuses [de Barcelone], aux côtés des protagonistes de batailles épiques – note pertinemment Claudio Albertani – que son individualisme commencera lentement mais inexorablement à vaciller. » Dans un premier temps, il s’initie à la langue et à l’étude des singularités du pays. Son mouvement libertaire, puissant et d’orientation nettement classiste, ne cède pas, comme en France, aux délices ravageurs du différentialisme et de la polémique. C’est ainsi qu’il constate qu’en Espagne – où l’individualisme est idiosyncrasique –, les anarchistes individualistes, même si leur poids est modeste – s’expriment régulièrement dans les publications syndicalistes de la Confédération nationale du travail (CNT), qui a alors sept ans d’existence et est en voie de consolider sa force. À vrai dire, qu’on puisse exposer des thématiques individualistes sans faire bande à part ni courant spécifique ravit Serge. Il a suffisamment connu le pire des sectarismes – qu’il a parfois lui-même alimenté dans la mouvance française – pour se féliciter que les anarcho-syndicalistes espagnols ne le pratiquent pas. L’autre découverte – également centrale dans son évolution –, c’est sans doute d’avoir apprécié, au quotidien des luttes sociales de Barcelone, la capacité combattante d’un prolétariat organisé, mais laissé maître de ses actions. Enfin, Serge est favorablement impressionné de constater que l’immense majorité des anarchistes catalans est internationaliste et hostile à la guerre. Sur le plan des idées, il collabore à la revue anarchiste Tierra y Libertad [20] et entame l’écriture de son second roman – Naissance de notre force [21] –, qui est un hymne au prolétariat insurgé de Barcelone et un hommage appuyé à Salvador Seguí (1887-1923) – Dario dans le livre. Pour vivre, car il le faut bien, Serge a repris son métier de typographe.
« L’une des particularités des romans de Serge, commente Claudio Albertani, est de mettre en scène des luttes sociales de manière non idéologique, à travers une pluralité de voix, d’attitudes et de points de vue contrastés. » C’est plus particulièrement le cas dans Naissance de notre force où l’on sent, à certains signes, que Serge est déjà réceptif aux échos de ce qui se trame en Russie sous cette bannière bolchévique qui finira par le fasciner, comme tant d’autres combattants de l’impossible, avant qu’il n’en discerne le tragique envers.
Le séjour de Serge à Barcelone dura six mois. Le 20 juillet 1917, le consulat de Russie à Barcelone lui délivre un passeport. Le document est visé le même jour par le consulat de France comme « visa militaire ». Le 24, il quitte Barcelone avec l’intention de passer par Paris et le projet de tout faire pour rejoindre la Russie en révolution. Car il est convaincu, comme tant d’autres, que, devant l’histoire, « l’insurrection anonyme » (Pierre Broué) de février 1917 doit accoucher de sa vérité.
La Russie rouge pour horizon
Méticuleux en diable, comme c’est son devoir, Claudio Albertani n’omet aucun détail des démêlés administratifs de l’apatride Victor Napoléon Kibaltchitch. Pour faire court, le papier que lui a délivré le consul russe de Barcelone est un sauf-conduit – la feuille de route 662-491 – pour se rendre à Paris. Il y a une raison à cela : seule l’ambassade russe sise à Paris peut valider ou refouler les demandes d’émigrants voulant s’engager comme volontaires dans l’armée russe. Ce qui complique – et comment ! – le cas de Serge, c’est son arrêté d’expulsion qui expire fin août. Après plusieurs tentatives infructueuses de Rirette auprès des autorités françaises pour demander sa suspension, Serge reçoit du consulat de France à Barcelone un « visa militaire spécial » lui faisant obligation, comme sujet apatride d’origine russe, de quitter le territoire avant le 23 août 1917. Ce sera le 24, avec un jour de retard. Le 14 août, le consulat général de Russie lui a fourni un document attestant de sa demande de rejoindre le corps expéditionnaire russe en France. Mais les services de renseignement de la police française veillent et agissent. Le 30 septembre, la légation militaire russe, qui travaille en étroite relation avec la police française, rejette la candidature de Serge. Le 1er octobre, accusé d’avoir enfreint plusieurs arrêtés d’expulsion, le subversif apatride est arrêté et remis en prison avant d’être expédié, le 6 octobre, au camp de triage de Fleury-en-Bière (Seine-et-Marne). Le 9 novembre (25 octobre dans le calendrier julien), la révolution russe éclate et porte les bolcheviks au pouvoir. En mars de l’année suivante, Lénine signe le traité de paix de Brest-Litovsk avec les puissances centrales. En mettant fin aux hostilités, le traité plonge le corps expéditionnaire dans l’embarras. Le 1er avril, Serge est transféré au camp de Précigné (Sarthe), où il retrouve beaucoup d’anarchistes – dont Barthélémy Baraille (1882-1970), un ancien de l’anarchie, et Paul Fouchs, ami de Voline (1882-1945), membre du groupe des anarchistes russes de Paris et proche de la revue Les Temps nouveaux.
Pendant sa détention, Serge n’a jamais cessé d’envoyer des articles à la presse anarchiste : essentiellement à La Mêlée, revue « libertaire, individualiste et éclectique », et au Libertaire. « L’heure présente – confiera-t-il à La Mêlée le 15 janvier 1919, à la veille de sa libération – est passionnément intéressante : dans les transformations qui s’opèrent d’un bout à l’autre du monde, que de naissances, que de promesses ! » Une quinzaine plus tard, alors qu’il se sait libérable, il précise ses intentions dans une lettre à La Mêlée : « Je vais là où m’attirent tant d’idées vives, tant de volontés, tant d’espérances hautes, en Russie. […] Je suis appelé à partir (volontairement) dans les premiers jours de janvier, avec un convoi destiné à être remis aux Soviets. […] Ma joie est inexprimable d’aller prendre ma part des peines et des labeurs de tous ceux qui, en Russie, continuent l’immense entreprise de transformation sociale. […] Je vais, pour ma part, vers l’incertain et l’inconnu avec une confiance absolue. Les plus dures épreuves n’ont fait que confirmer et assurer ma pensée, ma conception de la vie. [22] »
L’étape suivante, le 2 janvier 1919, c’est le voyage en train vers Dunkerque, d’où 24 prisonniers – dont Serge – doivent embarquer pour la Russie. Ils attendront jusqu’au 19 que le bateau – le Megali-Hellas, un vieux paquebot grec – prenne la mer. La traversée est lente, mais relativement tranquille. Et puis la mer sera toujours, pour les apatrides et les révolutionnaires, le symbole de la liberté reconquise. C’est la ligne d’horizon que fixent, d’étape en étape, ces visages durcis par les épreuves de la guerre et de l’humiliation. Là, sur cette mer de glace, ils se réchauffent en buvant du thé, en apprenant à se connaître, en conjuguant leurs aspirations à un monde nouveau. Ils sont camarades. C’est sur ce bateau fantôme que Serge a rencontré les Roussakov – et plus encore Liouba (1898-1984), qu’il surnomma tout de suite « l’Oiseau bleu » et qui deviendra sa compagne. Claudio Albertani dit d’elle que, pour Serge, elle fut comme « la fée qui l’accompagna dans sa nouvelle vie dans la Russie révolutionnaire ». Et il y a sûrement de cela dans cette histoire, une aspiration, chez Serge, au bonheur collectif que l’amour individuel porte à incandescence.
Le reste tient de la dernière étape. Le 26 janvier, les candidats à la Russie sont transférés sur un navire à vapeur portant pavillon danois et placé sous protection de la Croix-Rouge. Le 1er février, escorté de deux torpilleurs, il quitte Copenhague. Au cœur des passagers, une grande excitation, de la crainte aussi, celle d’être déçus. On garde l’excitation en chassant la crainte. Méthode de survie, encore. La plupart de ces êtres ont connu le pire. Qu’y a-t-il de pire que le pire ? Au quatrième jour de ce nouveau périple, leurs regards se posent sur les îles Aland, un archipel de la Baltique entre Suède et Finlande. Tout est blanc, l’air est glacial. Pour avancer, le navire danois a besoin qu’un brise-glace lui ouvre la voie en creusant une sorte de chenal. Le 6 février, les passagers aperçoivent Hanko, sur la côte finlandaise, la dernière ville disposant d’un consulat français. Puis, la nuit du 8 février 1919, ce sera, jusqu’à la frontière finno-russe, un train blindé s’enfonçant dans de vastes forêts de sapins enneigés. À l’arrêt du train, on procédera, en ce no man’s land, à une sorte d’échange : d’un côté, les nouveaux arrivants ; de l’autre, des officiers français retenus en Russie. Deux mondes qui ne se prêtent aucune attention.
On aura compris que Le Jeune Victor Serge, de Claudio Albertani, est un livre majeur dans la production historiographique sergienne. Il a, de surcroît, cette particularité de se lire comme un roman sans que la forme ne nuise au fond. Au contraire. Et c’est assez rare pour être noté. À la différence d’autres biographies très idéologisées de Serge – nous pensons notamment à celle Susan Weissman [23] –, Albertani, lui, s’intéresse à l’homme qui, derrière le militant ou l’activiste, se cherche et parfois se perd. Il n’y a probablement nulle autre manière de comprendre cet être complexe qui frôla, sa vie durant, tous les dangers, en les payant au prix fort, mais sans renier, sur l’essentiel, sa morale de lucide révolutionnaire. Inutile de préciser que nous attendons, dans l’impatience, le second tome – les années russes – de cet opus majeur.
Freddy GOMEZ
[1] Sur Vlady, nous renvoyons à « L’art, la matière et le sentiment de l’histoire » ; « Vlady dans l’antichambre du Goulag » ; « Hommage à Vlady ».
[2] Victor Serge, Carnets (1936-1947), Agone, Marseille, 2012, p. 6.
[3] En 1907, à la suite d’une campagne de dénigrement, « L’Expérience » devra quitter Stockel pour s’installer à Boitsfort, un autre faubourg de Bruxelles.
[4] C’est dans le même Communiste qu’on lira – n° 10, daté du 21 mars 1908 – un article de Serge – « Le péril » – signé pour la première fois de son pseudo le plus célèbre : Le Rétif. Autrement dit, c’est au Communiste que Serge s’initia et prit goût à l’écriture journalistique qui fera sa marque pendant quarante ans.
[5] Rhillon (pseudonyme de Roger Gillot (1884-1970), « Le commencement de la fin », Le Communiste, n° 17, 8 août 1908. Le Rétif, « Des moyens. Réponse à Rhillon », Le Révolté, n° 24, 11 novembre 1908.
[6] De son vrai nom Anna Henriette Estorges (1887-1968), Rirette Maîtrejean, militante anarchiste très active sur le plan de l’éducation et du journalisme, deviendra bientôt sa compagne.
[7] « Les anarchistes et la transformation sociale » (n° 252, 3 février 1910), « Notre antisyndicalisme » (n° 255, 24 février 1910) et « L’illusion révolutionnaire » (n° 264, 28 avril 1910).
[8] Arrêté pour une supposée affaire de proxénétisme en juillet 1909, le jeune prolétaire Jean-Jacques Liabeuf, originaire de Saint-Étienne, est condamné à trois mois de prison et cinq ans d’interdiction de séjour à Paris. Innocent, il ne supporte pas cette injustice. Dès qu’il est libéré, Liabeuf part à la recherche des pandores qui l’ont arrêté. Armé d’un revolver et de deux tranchets bien affûtés de cordonnier, il s’est protégé les bras de brassards hérissés de clous. À défaut de retrouver les policiers qu’il vise, il abat au hasard l’agent Degay et en blesse quatre autres. Son acte de vengeance est passible de la peine de mort. La mobilisation des partisans de Liabeuf ne l’empêche pas d’être condamné le 4 mai et exécuté le 1er juillet 1910 à la prison de la Santé. Victor Serge était présent à l’énorme rassemblement de ce jour devant la prison.
[9] Sur le sujet, nous recommandons vivement la lecture du très beau roman de Malcolm Menzies, En exil chez les hommes, traduit de l’anglais par Ariane Bataille, Rue des Cascades, 2007.
[10] À partir du numéro 327, daté du 13 juillet 1911, Rirette Maîtrejean devient la responsable légale de la revue. Le couple ne tarde pas, avec Maud et Chinette, les deux filles de Rirette, à s’installer dans la commune de Romainville.
[11] Le Rétif, « Les bandits », l’anarchie, n° 352, 4 janvier 1912.
[12] Souvenirs d’anarchie, La Digitale, Quimperlé, 2005, p. 89, et « En pleine bataille », éditorial dans l’anarchie, n° 357, 8 février 1912.
[13] « La bataille continue », l’anarchie, n° 364, 28 mars 1912.
[14] Léon Bloy, « La mort de Jules Bonnot », Le Pèlerin de l’absolu, tome VI.
[15] « La vindicte sociale à l’œuvre », l’anarchie, n° 371, 23 mai 1912.
[16] Dieudonné fut épargné au dernier moment grâce aux efforts de son avocat, Vincent de Moro-Gaffieri, pour être déporté à perpétuité à l’ile du Diable. Il sera gracié en 1928, à la suite d’une campagne de presse organisée par Albert Londres.
[17] Au soir de la sentence, Carouy se suicidera, dans sa cellule de la Conciergerie, en avalant une capsule de cyanure dissimulée dans la semelle de sa chaussure.
[18] Victor Serge, Les Hommes dans la prison, rééd. Libertalia, 2025.
[19] Victor Serge, Mémoires d’un révolutionnaire, Seuil, 1951, p. 39.
[20] Où, pour la première fois, il signe de son pseudonyme le plus connu – « Victor Serge » – un article littéraire consacré à Octave Mirbeau (1848-1917), l’auteur à scandale du Journal d’une femme de chambre, qui a longtemps affiché ses convictions anarchistes.
[21] Victor Serge, Naissance de notre force, 256 p., Climats, 2004 ; réédité en 2011 chez Flammarion.
[22] Lettre à la direction de La Mêlée, publiée dans le n° 19, 1er février 1919.
[23] Susan Weissman, Dissident dans la révolution. Victor Serge, une biographie politique, Éditions Syllepse, 2006.