Éditions Libertalia
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vendredi 9 mars 2018 :: Permalien
Dans Jazz News, février 2018.
« Piraterie, rock et lutte des classes » : tel était le tiercé initial des éditions Libertalia, expliquait en 2012 son fondateur et taulier au regretté site Article 11. Ce livre lui est fidèle, suggère le traducteur dans une note introductive aussi brève que bienvenue. Les blueswomen peuvent être considérées comme les « premières rock stars de la musique enregistrée ». Vedette de la gauche révolutionnaire américaine, Angela Davis est une pirate à sa manière – quoique derrière l’icône, écrit Julien Bordier, il faut saisir la pensée. Quant aux conflits sociaux et raciaux, l’autrice y est évidemment sensible, elle qui propose une lecture plus sociologique et politique qu’esthétique, placée dans la tension entre oppression et émancipation. Pour Ma Rainey et Bessie Smith, il s’agit pour elle de rappeler l’importance de figures fondatrices mais atypiques, menacées par l’oubli ou l’édulcoration parce que « noires, bisexuelles, fêtardes, indépendantes et bagarreuses. » Concernant Billie Holiday, l’enjeu est plutôt de sortir du prisme misérabiliste à quoi condamne le récit d’une biographie tourmentée. Le contenant est aussi beau que le contenu : travail soigné, CD inclus (la playlist de 18 titres est aussi gracieusement disponible sur le site des éditions) et paroles en prime.
vendredi 9 mars 2018 :: Permalien
Dans CQFD, septembre 2017.
Comment peut-on être anarchiste ? en nos temps cyniques où règne le réformisme « ne réformant jamais rien » demande l’impétueux Claude Guillon dans son recueil d’articles, de tracts et de posts sans merci (2000-2015) portant ce titre que les éditions Libertalia ont eu le cran de sortir. Et l’auteur des cravachants La Terrorisation démocratique (Libertalia aussi) et de Notre patience est à bout (IMHO) de répondre on ne peut plus concrètement et explosivement à sa question tout au long du brûlot : en faisant la révolution, jambon à cornes !, « la révolution étant le projet collectif de la libre association d’individus libres qui commencent à changer le monde dès maintenant ». Effectivement, précise Guillon, « pour que l’utopie soit la sœur de l’action, il est possible de commencer tout de suite, dans chaque mouvement de résistance sociale, à expérimenter de nouveaux rapports : se réunir sans les vieilles organisations, occuper des lieux privés ou publics et en faire des lieux de vie et de libre expression, vérifier dans les risques partagés et les victoires communes que l’on gagne à se connaître ». Et plus loin : « Nous n’avons d’autre choix que nous déclarer nous aussi en état d’urgence. On se bouge. » On se bouge en se ralliant aux insurrections libertaires visant « l’utopie d’un monde sans frontière, sans argent et sans chefs ». S’il est vain, continue le polémiste, de dresser par avance le catalogue des mesures révolutionnaires qui s’imposent, on peut d’ores et déjà établir, « pour donner des ailes à la pensée critique », qu’il ne s’agira pas d’autogérer cette société piteuse mais de la transformer malicieusement, de bannir tout espèce de rapport de pouvoir ou d’autorité, de veiller à ce que la liberté personnelle soit confirmée par la liberté de tous, d’exalter fourieristement les expérimentations amoureuses, ou d’accepter que les assemblées générales souveraines prenant des décisions clés puissent être constituées par les manifestants dans la rue.
Noël Godin
jeudi 8 février 2018 :: Permalien
Le Soir , 6 février 2018.
« Nous ne céderons rien à l’antisionisme, car il est une forme réinventée de l’antisémitisme. » Contrairement aux apparences, cette phrase n’a pas été prononcée par l’Israélien Benyamin Netanyahou mais bien par le président de la République française, Emmanuel Macron, le 16 juillet 2017.
Elle en avait fait sursauter plus d’un. Dont Dominique Vidal, qui a décidé d’écrire un petit livre, Antisionisme = antisémitisme ? Réponse à Emmanuel Macron.
En trois chapitres qui narrent l’histoire du sionisme, de l’antisionisme et de l’antisémitisme, le lecteur se familiarise ainsi avec des notions qui ne lui sont peut-être pas limpides. Cent seize pages format poche. Du grand art.
L’historien Dominique Vidal, un journaliste chevronné qui a fait l’essentiel de sa carrière au Monde diplomatique, connaît la matière pour la pratiquer depuis plusieurs décennies. Son approche, didactique, permet aux profanes ou aux sceptiques de mieux saisir les enjeux lexicaux à partir d’une approche historique. Car il ne faut pas s’y tromper, justement : antisionisme et antisémitisme sont bien deux concepts différents.
D’ailleurs, de nombreux Juifs opposés à la création d’un État juif ont jalonné l’histoire même du sionisme. Ils étaient antisionistes, assurément pas antisémites. Et il en reste…
Comme le dit l’auteur, l’antisionisme est une opinion tandis que l’antisémitisme est un délit. Mais voilà, la manœuvre consiste à amalgamer les notions. Pour mieux faire taire les critiques contre Israël. À l’heure où ce pays, mené par un gouvernement de la droite extrême, connaît un isolement croissant, ses partisans acharnés recourent volontiers à cet amalgame. Dominique Vidal explique en quoi Emmanuel Macron, en s’associant à cette confusion, commet « une erreur », voire « un dérapage ».
Baudouin Loos
jeudi 8 février 2018 :: Permalien
Dans Les Cahiers de l’Institut CGT d’histoire sociale, n° 144, décembre 2017.
Les lecteurs des Cahiers connaissent bien Julien Chuzeville. Cet historien du mouvement ouvrier a publié de très intéressantes monographies dont nous avons déjà souligné l’intérêt. Avec cette dernière livraison, l’auteur nous livre sa lecture de la création du parti communiste français. Né de la scission opérée à Tours en 1920 au congrès socialiste, le parti communiste français plonge ses racines dans le choc profond pour certains que fut le ralliement du mouvement ouvrier français à l’Union sacrée. C’est dans le vivier des militants du Comité pour la reprise des relations internationales et des zimmerwaldiens que va naître la génération qui opère la rupture de 1920. Très largement imprégnée par la culture du syndicalisme révolutionnaire, une première génération du parti communiste français, dont Fernand Loriot, Boris Souvarine et Pierre Monatte sont les principales figures, se construit en opposition au parti socialiste d’avant-guerre. Mais cette tendance se heurte rapidement à la construction d’un appareil très largement piloté et aidé par l’Internationale communiste. En 1924, le processus de bolchévisation est arrivé à son terme au prix de nombreux ruptures et départs. Un livre qui s’appuie sur des archives en partie inédites et qui fournit en outre sur la création de la CGTU un tableau clair et précis sur les enjeux de la scission syndicale. Bref, lisons Julien Chuzeville !
J. B.
jeudi 8 février 2018 :: Permalien
Dans Alternative libertaire n° 280, février 2018.
Quarante-sept portraits de citoyens israéliens qui ont refusé de servir dans l’armée de leur pays sont photographiés, servis d’un texte percutant.
Des refuzniks comme on les appelle depuis que ce mouvement a essaimé avec la guerre du Liban. « Schministin, pacifistes, rescapés d’une tentative de suicide, réformés, réservistes », il faut du courage pour s’insoumettre dans un pays en état de guerre permanente où il est un devoir de protéger les frontières. Le photographe Martin Barzilai a commencé ce reportage en 2008 dans le village de Ni’ilin où des manifestations contre le mur avaient lieu. La préface d’Eyal Sivan est éclairante sur la situation des insoumis : « Le numéro d’identifiant militaire est appelé tout simplement numéro personnel… » Le professeur Leibovitz ajoute : « Ici, l’insoumission relève de l’héroïsme. » Taïr Kaminer, emprisonnée cent cinquante jours pour refus de servir une armée d’occupation raconte : « Cela fait partie de la problématique générale de ce pays, tout est relié à la peur. »
Que dire d’Omer Goldman, figure d’Antigone et fille d’un général membre du Mossad qui a passé deux mois en prison et dont le père promettait de venir lui jeter des cacahouètes en détention où il n’est finalement jamais venu la voir.
C. G.